vendredi 23 janvier 2015

EM : Refus de l’asile à un sahraoui, et prise de position douteuse de l’Espagne



L’Espagne vient de refuser l’asile sur sa terre à Hassana Aalia. Hassana est un journaliste sahraoui, son pays le  Sahara Occidental est une ancienne colonie espagnole, envahie en 1975 notamment par le Maroc quand l’Espagne en est partie en signant avec les deux nouveaux colonisateurs (Maroc et Mauritanie retiré en 1979) des accords tripartites illégaux.

Hassana Aalia est journaliste de l'Equipe Média et militant sahraoui pour l'indépendance du Sahara Occidental. Il  est né en 1989 à El Aaiun occupée. Il s’est engagé dans la résistance sahraouie depuis le déclenchement de l'Intifada le 21 mai 2005. Il a été arrêté et torturé à sept reprises après avoir participé à des manifestations pacifiques sans jamais avoir comparu devant un juge, et la première fois en 2007 avec Mohamed Hali, un autre activiste devenu lui aussi journaliste correspondant.
Hassana Aalia est cofondateur de l'Equipe Média, agence de presse sahraouie créée en 2009 dans les territoires occupés du Sahara Occidental. Au moment de l’apparition et l’installation d’un nombre croissant de tentes à Gdaim izik, l'Equipe Média a chargé Hassana de suivre les événements qui ont aboutit à la grande manifestation populaire qui pendant tout le mois d’octobre 2010 a regroupé jusque 20 000 Sahraouis dans le désert proche de El Aaiun occupée. Hassana a filmé l’organisation des Sahraouis dans le campement, leurs réactions et protestations contre l'occupation marocaine, les mouvements des policiers et militaires marocains dans l’encerclement du campement, les violences et manœuvres discriminatoires.
Après le démantèlement du campement le 8 novembre 2010, les autorités d'occupation ont procédé à une vaste compagne d'arrestation. Plus de 300 sahraouis ont été arrêtés. Hassanna a été arrêté deux fois en janvier 2011. A chaque fois la police marocaine l’a libéré après deux jours de garde à vue, faute de pouvoir retenir des charges contre lui, en l’absence de preuve.
 Il a ensuite participé au 11e Forum social mondial qui s'est tenu du 6 au 11 février 2011 à Dakar puis en septembre il a quitté les territoires occupés avec un visa pour suivre  une session de perfectionnement de la langue espagnole aux pays Basque et participer à des colloques sur le confit du Sahara Occidental.  
C’est à ce moment qu’il a appris qu’un mandat d'arrêt avait été émis contre lui pour « atteinte à la sécurité intérieure et extérieure de l’Etat, formation d’une bande criminelle et atteinte aux fonctionnaires publics dans le cadre de l’exercice de leur fonction »
En octobre 2012, après avoir rassemblé les documents nécessaires, Hassana a demandé l'asile auprès des autorités espagnoles aux pays Basque. Il est persuadé que rentrer dans son pays occupé pour y retrouver sa famille comporte un trop grand risque pour sa vie et sa liberté. Il craint de subir la torture comme ceux du groupe avec lequel il a été jugé, et comme tant de collègues activistes ou journalistes, dont certains sont encore disparu.
Parallèlement, pendant qu'il attendait la réponse à sa demande d'asile, Hassana a continué à être journaliste pour l’Equipe Média et militant, depuis l'Espagne.
Au Maroc, le17 février 2013, la cour martiale l’a condamné à perpétuité sans qu’aucune preuve n’ait été avancée pour servir les accusations portées contre lui.  Selon Hassana il a été condamné comme les autres prisonniers du groupe dit de Gdaym Izik du fait de ses convictions politiques, lui le « journaliste et militant pacifique pour l'indépendance de (son) pays ».
Vendredi 16 janvier 2015, Hassana a reçu une convocation de la police nationale espagnole lui enjoignant de se rendre le lundi suivant, le 19 janvier, au commissariat de San Sébastien. Il lui a était à ce moment signifié le rejet de sa demande d'asile. Sa carte de séjour lui a été confisquée, et les autorités lui ont donné un délai de 15 jours pour quitter le territoire espagnol.
Selon Hassana et son avocat, le motif du refus de l’asile par l’Espagne est que celle-ci qualifie d’équitable le procès des Sahraouis civils jugés et condamnés par la cour martiale marocaine après la manifestation de Gdaym Izik, qualification qui va à l’encontre de rapports de nombreux observateurs internationaux, et en l’absence de toute preuve produite par l’accusation.
L’assistance juridique qui entoure Hassana va engager toutes les démarches possibles pour annuler le délai d’expulsion de 15 jours et lui permettre de travailler au dépôt du recourt contre la décision du ministre de l’intérieur devant la cour nationale de demande d’asile dans les délais légaux.
Alors que le peuple espagnol se dit solidaire et ami des Sahraouis, les soutenant fortement dans les campements de réfugiés ou ailleurs, cette décision de leur gouvernement est particulièrement paradoxale.

Equipe Média, El Aaiun Occupée
Le 23 janvier 2015